mercredi 26 mai 2021

The Underground Railroad : une série d'une beauté époustouflante pour une réalité terrifiante

 

Peu de temps avant la guerre de Sécession, Cora, une jeune esclave, s’enfuit d’une plantation en Géorgie et découvre le mythique chemin de fer clandestin, un réseau souterrain et secret où des trains emmènent les esclaves en fuite loin des Etats esclavagistes du Sud. Mais elle doit rester sur ses gardes car elle est poursuivie par un redoutable chasseur d’esclave, bien décidé à la retrouver et la ramener à son propriétaire.

Adaptation en mini-série du roman éponyme de Colson Whitehead, qui a reçu le prestigieux prix Pulitzer, The Underground Railroad fait référence au réseau clandestin qui existait bel et bien et aidait les esclaves en fuite à rejoindre le Nord, jusqu’au Canada. Mais dans le roman comme dans la série, inspiration géniale, ce réseau est matérialisé par un vrai chemin de fer souterrain.  

Réalisée par Barry Jenkins (oscarisé pour Moonlight), la mini-série est un pur chef d’oeuvre, ne mâchons pas nos mots. Pourtant, je n’avais pas été pleinement convaincu par Moonlight ou Si Beale Street pouvait parler, des films dans lesquels je trouvais un certain maniérisme et des longueurs. Mais toutes ces réserves disparaissent ici et je reste sous le choc de The Underground Railroad. Le temps long de la série se prête parfaitement au talent du réalisateur. Son lyrisme et son esthétisme sont là pour évoquer l’intolérable voire l’insoutenable. C’est fascinant et terrible à la fois. Car les images sont à couper le souffle, avec un travail extraordinaire sur la lumière, des plans parfois follement sophistiqués, toujours inventifs. Tout fascine formellement. Quant à l’histoire, poignante, éprouvante parfois, allant jusqu’à être difficilement supportable dans certaines scènes, elle est d’une force incroyable. 

Rarement on n’aura vu une telle évocation de l’esclavagisme en Amérique, où s’expriment le racisme et la haine, et les discours suprémacistes insupportables, où des êtres humains, parce qu’ils ont la peau noire, sont traités comme des bêtes, pires que du bétail, comme de simples possessions appartenant à leurs maîtres qui ont un pouvoir absolu sur eux. 

C’est une série qu’il faut prendre le temps de regarder. Accepter son rythme lent mais extrêmement chargé. N’essayez pas de la binge watcher... Chaque épisode doit se digérer et ça demande un peu de temps. Certaines images ne vous quittent pas. Y a-t-il quelques longueurs parfois ? Peut-être… mais si peu. Et c’est tellement beau, parfois même sublime. Certains épisodes sont bien-sûr plus forts que d’autres : le premier épisode est un choc, le neuvième peut-être encore plus. Et l’ensemble est impressionnant. 

Les nombreux acteurs qu’on suit sur un ou plusieurs épisodes sont tous excellents et Thuso Mbedu, totalement inconnue, est tout simplement incroyable dans le rôle de Cora. 

Regarder en face la réalité insoutenable d’un passé aussi sombre est important pour comprendre le présent. Car les racismes d’aujourd’hui sont encore les héritiers terrifiants de l’esclavagisme d’hier. A cet égard, The Underground Railroad est une mini-série indispensable. 

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The Underground Railroad, une mini-série de Barry Jenkins
10 épisodes (d'au moins une heure, sauf pour deux épisodes plus courts) disponibles sur Amazon Prime Video


samedi 8 mai 2021

Yellowstone : ton univers impitoyable !

 

Yellowstone, c’est le nom d’un ranch immense dans le Montana (le propriétaire en fait le tour à bord de son hélicoptère !) qui appartient à John Dutton, l’homme le plus influent de toute la région, patriarche qui règne d’une main de fer sur sa famille dysfonctionnelle, hantée par le fantôme de la mère, décédée accidentellement plusieurs années auparavant. 

Alors que la série fait un carton aux USA où trois saisons sont déjà sorties, la première saison vient seulement d’arriver en France, sur la plateforme Salto. 

Western contemporain, une sorte Dallas moderne, avec son univers impitoyable, mais dans le Montana, Yellowstone est une série âpre et sombre, où règne le fric, la corruption et la violence, un Western où les cow-boys et les indiens se rendent coup pour coup, avec les mêmes armes capitalistes. Il n’y a pas vraiment de gentils dans Yellowstone… 

On ne peut pas dire non plus que la série soit féministe… Les personnages féminins sont un peu caricaturaux, et dans cet univers macho, si les femmes veulent s’en sortir, il faut qu’elles agissent comme des mecs, en utilisant les mêmes méthodes. Et puis il y a aussi un côté soap opera qui peut finir par agacer un peu à la longue… 

Mais Yellowstone est une série qui a tout de même plusieurs atouts à souligner : le soin de la réalisation (tous les épisodes sont réalisés par Taylor Sheridan, également scénariste), les paysages magnifiques du Montana, écrin grandiose de chaque épisode, mais aussi Kevin Costner, absolument remarquable dans le rôle principal de la série. 

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Yellowstone, série de Taylor Sheridan

La saison 1 (9 épisodes de 50 minutes environ) est disponible sur Salto



samedi 1 mai 2021

Shadow and Bone : divertissant et visuellement très réussi

 

Le Fold, un brouillard maléfique extrêmement dense, scinde le royaume de Ravka en deux depuis des siècles. Extrêmement périlleux à traverser, peuplé de monstres terrifiants, le Fold a été créé par le reoutable Hérétique noir, qui avait le pouvoir invoquer les ténèbres. Dans ce royaume, on teste dès le plus jeune âge les enfants pour discerner ceux qui ont développé des pouvoirs magiques. On les nomme les Grishas. Ils sont divisés en plusieurs ordres selon leurs pouvoirs. Alina Starkov avait échappé au test, pour ne pas être séparé de Mal, son ami d’enfance. Plus tard, devenue cartographe, elle est engagée dans une traversée du Fold lorsque son pouvoir est révélé accidentellement : elle semble capable d’invoquer la lumière. Sera-t-elle l’élue qui va détruire le Fold ? 

La série s’inspire d’une saga de la littérature jeune adulte et mélange, semble-t-il (je ne les ai pas lu…) des éléments tirés de la trilogie Grisha et de la duologie Six of Crows, écrites par Leigh Bardugo. L’intrigue se situe dans un monde imaginaire, un univers fantasy à l’ambiance Steam Punk, qui ressemble à la Russie tsariste du XIXe siècle (avec de la magie en plus). C’est d’ailleurs la grande force de la série qui parvient à créer ce monde de façon convaincante. Visuellement, c’est très réussi et assez original pour une série de fantasy (ça rappelle un peu, à certains égards, le monde de Carnival Row). 

En plus d’Alina et Mal, on suit notamment le général Kirigan, qui accueille et forme les Grishas dans son palais, et un petit groupe de bandits dirigée par Kaz Brekker, à l'affût de tout contrat pouvant lui rapporter un maximum d’argent. L’univers est suffisamment riche et les personnages suffisamment attachants - et incarnés par une bande de jeunes acteurs pour la quasi totalité inconnus mais franchement bons - pour qu’on suive la série avec plaisir. Il y a bien-sûr un petit goût de déjà vu dans l’intrigue qui ne révolutionne pas le genre, et qui coche toutes les cases de ce type d’histoires : le bien et le mal, une prophétie, un parcours initiatique, avec de l’action, de la magie et de l’amour… Mais le tout reste très familial : on est loin de la violence et de l’ampleur des intrigues politiques de Game of Thrones

Shadow and Bone, qui va sans doute faire un carton sur Netflix, est donc une assez jolie réussite, une série à voir sans hésiter pour se divertir. On attend la suite !

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Shadow and bonne : la saga Grisha. Une série de Eric Heisserer.

8 épisodes de 50 minutes envisron, disponibles sur Netflix.