vendredi 31 juillet 2015

La isla minima : un formidable polar crépusculaire !

Dans l'Espagne post-franquiste des années 80, en Andalousie, deux flics enquêtent sur la disparition de deux jeunes filles. Ils découvriront un sombre réseaux de pratiques sauvages et se heurteront à la loi du silence pour mener leur enquête.

La isla minima est un polar sombre, crépusculaire, parfois halluciné. En 1980, les fantômes de l'époque franquiste sont encore bien présents et refont vite surface, comme les cadavres dans les marécages. Les tortures infligées aux victimes font écho aux tortures perpétrées sous la dictature. La frontière entre les bons et les méchants est floue...

Le réalisateur, Alberto Rodriguez, entretien cette atmosphère crépusculaire de façon remarquable, enchaînant les plans angoissants, hallucinés, haletants (la poursuite en voiture dans les marécages, ou celle sous la pluie à la fin du film !), avec des images parfois sublimes. Et puis il y a ces étonnantes prises de vue des marécages à la verticale, prises en hauteur : à la fois superbes et oppressants, rendant les acteurs du drame tout petits, perdus au milieu de l'immensité. Fascinant.

Les deux acteurs principaux (Raùl Arévalo et Javier Guttiérrez) sont excellents et le scénario très bien ficelé, avec un dénouement bien dans l'esprit du film, qui pose la question de la frontière entre le bien et le mal, du poids du passé et de la culpabilité, et de la façon de s'en libérer.

Tout cela fait de La isla minima un polar remarquable, peut-être même le thriller de l'année !

mercredi 8 juillet 2015

Victoria : un film pas comme les autres

Victoria, une jeune espagnole qui vit depuis peu à Berlin, rencontre quatre jeunes gens à la sortie d'une boîte de nuit. Elle finit par les suivre pour une virée nocturne qui tournera finalement au cauchemar.

La grande originalité du film est qu'il est constitué d'un unique plan séquence de 2h20. On vit donc l'action en temps réel, de la première à la dernière image. Ca donne un côté un peu expérimental au film qui est à la fois sa force et sa faiblesse.

Le film n'est donc pas parfait. Il y a quelques invraisemblances dans le scénario, une intrigue qui peine un peu à démarrer... Mais quand le cauchemar se met en marche, le film devient assez haletant. Tourné caméra à l'épaule, avec des plans le plus souvent rapprochés, une image instable, le film crée un sentiment d'urgence assez étonnant. A noter aussi que les jeunes acteurs s'en sortent très bien.

En tout cas, quelle prouesse de réaliser un tel tournage ! Impressionnant. Un film vraiment pas comme les autres.

mardi 7 juillet 2015

Love & Mercy : Biopic passionnant et plongée dans l'esprit d'un génie créateur

Love & Mercy est un biopic passionnant sur la vie de Brian Wilson, compositeur et leader des Beach Boys. L'excellente idée du scénario est de concentrer le récit sur deux périodes précises de la vie du musicien : dans les années 60, au sommet de la gloire, quand les problèmes névrotiques de Brian Wilson s'intensifient ; et une vingtaine d'année plus tard, alors que Brian Wilson est cloîtré chez lui, complètement sous l'emprise de son médecin, au moment où il rencontre la femme qui le sauvera. Le film oscille entre ces deux périodes de la vie du musicien.

Le film est passionnant pour plusieurs raisons. D'abord pour la véritable plongée qu'il propose dans le processus créateur d'un esprit génial mais fragilisé par son enfance difficile, notamment avec la figure oppressante et violente de son père, dont l'emprise se poursuit. Le musicien doit faire face à ses angoisses et ses voix intérieurs pour laisser éclater son génie créateur. Les séances d'enregistrement dans les studios sont aussi formidables, en totale immersion.

Passionnant aussi pour l'histoire d'amour et de rédemption d'un homme brisé, prisonnier d'un médecin qui l'a isolé de sa famille et de ses proches. Une rédemption grâce à l'amour d'une femme, grâce à sa douceur et sa patience, autant que sa fermeté.

Passionnant enfin pour la performance des acteurs. Paul Dano pour le Brian Wilson des années 60 et John Cusack pour celui des années 80 sont tout simplement extraordinaires. Mais il faut aussi mentionner l'interprétation touchante d'Elizabeth Banks et, surtout, la performance de Paul Giamatti, inquiétant dans le rôle du Dr Landry.

Quant à la réalisation de Bill Pohlad, elle est remarquable et arrive à nous faire pénétrer dans l'esprit tourmenté de Brian Wilson ou vivre de l'intérieur un enregistrement en studio. Passionnant. Vraiment.

lundi 6 juillet 2015

Tale of Tales : étonnant conte onirique et cruel

Dans Tale of Tales, trois récits s'entremêlent : une reine prête à tout pour avoir un enfant ; un roi libertin qui tombe amoureux d'une femme en l'entendant chanter, sans savoir qu'elle est vieille et laide ; un autre roi, fasciné par un étrange animal, au point de négliger sa fille unique qui se retrouvera mariée à un ogre.

Nous voilà bien dans un conte, avec des rois et des reines, des princes et des princesses, des monstres et des sorcières... avec, bien-sûr, des décors et des costumes baroques, de circonstance, mis en valeur par une belle photographie. Le tout est porté par la musique d'Alexandre Desplat, encore une fois excellente, qui ajoute encore à la dimension onirique du film, et mis en scène de façon élégante par Matteo Garrone

Pour pleinement apprécier le film, il faut se laisser porter, accepter les invraisemblances (on est dans un conte : tout est possible)... et la magie opère ! Mais comme souvent dans les contes, les histoires sont cruelles, parfois sombres. et tournent autour de grandes questions comme le désir d'enfants, la quête de l'éternelle jeunesse, le piège des apparences, les difficultés de la paternité... Ces questions sont abordées avec le langage symbolique du conte. A cet égard, j'ai particulièrement été touché par le très beau dénouement de l'histoire avec Salma Hayek.

Tale of Tales est vraiment un film étonnant, entre rêve et cauchemar, un triple conte assez fascinant.