Depuis les années 1990, des lobbys pharmaceutiques ont poussé les médecins généralistes aux USA à prescrire très largement à leur patient des antidouleurs à base de dérivés d’opiacés. C’est le cas en particulier de l’OxyContin, développé par Purdue Pharma, et qui était présenté comme un antidouleur ne provoquant pratiquement aucune dépendance. Sauf que c’était un mensonge… et que sa vente massive a provoqué une vague d’addiction et de morts par overdose.
Si vous avez déjà vu Dopesick, l’excellente mini-série sortie sur Disney+ sur le même sujet, en 2021, vous ne serez pas surpris par PainKiller. Mais l’approche est un peu différente cette fois, avec un ton franchement caustique et une mise en scène de Peter Berg nerveuse et même parfois assez frénétique, un peu à la manière d’Adam McKay, pour une plongée glaçante dans le cynisme de Purdue Pharma et son PDG. Avant chaque épisode, une mère et/ou un père, face caméra, rappelle que le programme est basé sur des faits réels, même si certains personnages sont fictifs ou certains éléments romancés pour les besoins de l’intrigue. Mais ce qui n’est pas romancé, c’est la mort, à cause de l’OxyContin, de leur fils ou leur fille dont ils montrent la photo. Si ces témoignages ont le mérite de rappeler que ce qui nous est raconté s’est bel et bien passé, aussi incroyable que cela puisse paraître, le procédé, systématique, est quand même un peu appuyé…
Le récit est basé sur le témoignage du personnage principal, une enquêtrice au bureau d'un procureur qui a enquêté sur l’OxyContin après avoir été interpellée, un peu par hasard, par la quantité impressionnante de prescriptions qu’en faisait un médecin, pensant d’abord à une fraude. Trois fils narratifs s’entremêlent : une jeune femme qui veut gravir les échelons et amasser un max d’oseille en étant VRP de l’OxyContin auprès des médecins, un père de famille à qui est prescrit de l’OxyContin à la suite d’un accident de travail et qui va devenir accro, et enfin Richard Sackler (incarné par un Matthew Broderick glaçant), le PDG de Perdue Pharma, dont le seul but est de vendre le plus possible de pilulles de son médicament, par tous les moyens, au prix d’études bidons, de publicités mensongères, et de manipulations diverses. Ce qui, il faut bien le dire, est d’un cynisme absolu et révoltant, quand on sait que l’OxyContin serait à l’origine de plus de 300 000 morts par overdose.
Dopesick était sans doute plus sobre, plus posé et centré plutôt sur les victimes, PainKiller est plus corrosif et subjectif, et plutôt centré sur Richard Sackler, présenté comme obsédé par la figure de son oncle, son modèle auquel il a succédé à la tête de l’entreprise familiale, et avec le fantôme duquel il “dialogue” tout au long de la série. On peut préférer l’une ou l’autre approche (j’aurais sans doute une petite préférence pour Dopesick…), mais elles se complètent, pour dénoncer un scandale sanitaire terrible, et aussi plus largement les failles du système, notamment médical, judiciaire et politique, les effets délétères d’un capitalisme sauvage, le pouvoir destructeur de l’argent et de l’appât du gain.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Un commentaire ?