dimanche 22 juin 2025

Querer : Quand les violences conjugales ne se voient pas...

 

Après 30 ans de mariage, Miren décide de quitter son mari et de porter plainte contre lui, pour violence conjugale. Lorsque leurs deux fils adultes l’apprennent, ils encaissent le choc et peinent à le croire… 

D’une grande force et d’une grande justesse, Querer est une mini-série espagnole à voir de toute urgence. L’intelligence de la série est de nous faire naviguer plutôt en zone grise : on n’est pas face à un méchant évident voire caricatural mais en présence d'un couple qui, au premier abord, semble normal, même si le mari est plutôt autoritaire et l’épouse plutôt effacée. 

Il n’y a aucun flashback dans la série, ce qui fait qu’on ne voit jamais les faits que Miren reproche à son mari. On constate son état de fébrilité, sa détresse… tout comme sa détermination. On voit par ailleurs le mari qui ne comprend pas ce qui lui arrive et qui nie tout ce qui lui est reproché. On voit aussi la réaction des deux fils, leur désarroi à devoir choisir qui croire de leur père ou de leur mère. Mais il y a quelques indices, comme par exemple le fils aîné qui semble commencer à reproduire ce qui est reproché à son père. 

La série pose la question des violences conjugales invisibles, comme celles de l’emprise ou du viol conjugal, des violences évoquées explicitement mais avec de pudeur, en restant centré sur la victime et ses proches. On constate combien la parole d’une victime comme Miren est difficile à entendre, voire niée, sa souffrance minimisée : elle est petit à petit isolée, délaissée par ceux qui refusent de la croire. 

L’épisode 3, autour du procès, permet de souligner la difficulté de juger de tels faits, d’arriver à prouver de telles violences… c’est la parole de l’un contre la parole de l’autre. Et à qui bénéficie le doute ? 

Enfin l’épisode 4 termine la série de manière magistrale, avec un récit à la fois d’une finesse et d’une intensité extraordinaires, dans lequel les masques tombent un peu. Le dernier plan de l’épisode final, très beau, dit tout du parcours de Miren. A jamais marquée, fragilisée par ce qu’elle a enduré, elle avance malgré tout, avec une reconstruction et un avenir possible pour elle. 

On a comparé Querer à Adolescence, au moins pour son impact, la prise de conscience à laquelle la série peut mener. Mais l’approche est tout de même très différente. Il ne s’agit pas de dire que l’une a raison et l’autre pas. Mais Querer adopte un ton spécifique, plein de retenue et de pudeur, ce qui n’enlève aucunement la force du propos. Sur un sujet essentiel, Querer est une série nécessaire qui peut, on l’espère, amener à des prises de conscience et, c’est certain, alimenter de saines discussions sur le couple et les pièges de l’emprise, voire des remises en question salutaires.

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Querer, une mini-série créée par Alauda Ruíz de Azúa, Eduard Sola et Júlia De Paz Solvas 
avec Nagore Aranburu, Pedro Casablanc, Miguel Bernardeau
Disponible sur arte.tv

lundi 26 mai 2025

The Last of Us (saison 2) : Un récit de survie et de vengeance, au risque de perdre son humanité

 

La deuxième saison de The Last of Us, adaptation en série d’un célèbre jeu vidéo, vient de se terminer sur Max. Et cette nouvelle saison est aussi réussie que la première. La suite des aventures d’Ellie et Joel est toujours aussi incertaine et dangereuse. Et bien que la menace des personnes infectées par le cordyceps demeure, les plus grands dangers viennent d’ailleurs. Et ils prennent encore de nouvelles formes au cours de cette saison 2… 

Une des thématiques centrales de la série est la redoutable spirale de la violence et de la vengeance, au risque de perdre son humanité. C’est ce qui en fait une série sombre mais passionnante, parfois dérangeante (intentionnellement).  

Ce qui fait par ailleurs la force de la série, c’est qu’elle parvient non seulement à proposer un survival post-apocalyptique tendu et stressant, mais qu’elle réserve aussi de nombreux moments d’émotion, poignants et même déchirants. C’est le cas, cette saison, du magistral épisode 6, tout entier fait de flashbacks évoquant l’évolution de la relation entre Joel et Ellie, et remontant même bien plus en amont, expliquant de nombreux points restés dans l’ombre jusque là.  

Et puis il y a toujours l’étonnante performance de Bella Ramsey dans le rôle d’Ellie. Et plus globalement d'un très bon casting d'ensemble. 

La saison 2 se termine, comme il se doit, avec un gros cliffhanger… Il va falloir attendre la saison 3 pour connaître la suite (en tout cas pour ceux qui, comme moi, ne connaissent pas le jeu vidéo). 

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The Last of Us (saison 2), une série créée par Neil Druckmann et Craig Mazin
avec Bella Ramsey, Pedro Pascal, Gabriel Luna
Saison 1 (9 épisodes) disponible sur Amazon Prime Video

jeudi 22 mai 2025

The Studio : une satire féroce et hilarante du petit monde d'Hollywood

 

Matt Remick est nommé comme nouveau directeur de Continental Studios, une société de production de films en difficulté. Normalement, Matt est plutôt amateur de films d’auteurs mais pour sauver Continental, il devra accepter de financer un blockbuster autour de la mascotte de Kool-Aid, un célèbre mélange pour boissons artificiellement aromatisées. 

The Studio est une satire féroce et très drôle du petit monde d'Hollywood. Chaque épisode est un jeu de massacre, tout part en sucette… et c’est hilarant. Les derniers épisodes sont particulièrement délirants : l’épisode 8 lors de la cérémonie des Golden Globes, et le double épisode 9-10 pendant le CinemaCon à Las Vegas. 

On retrouve dans la série une pluie de guests prestigieux, et cela à chaque épisode (dès le premier épisode on croise Martin Scorsese par exemple !). Ils jouent en général leur propre rôle, ou plutôt une caricature de leur propre rôle, pleine d’autodérision très réjouissante. 

Les épisodes, courts, sont hyper-rythmés, sans temps mort. Ils sont tous tournés en plans-séquences. Et même, pour l’épisode 2 qui raconte justement la visite du boss sur le plateau d’un film où doit être tourné un plan-séquence, c’est l’ensemble de l’épisode qui n’est qu’un seul plan-séquence de 25 minutes.

Le tour de force de la série, en plus d’être hilarante et brillamment interprétée, c’est de parvenir, derrière la satire mordante, à être finalement aussi une ode au cinéma… Génial. 

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The Studio, une série créée par Seth Rogen, Evan Goldberg et Peter Huyck
avec Seth Rogen, Catherine O'Hara, Ike Barinholtz
Disponible sur Apple TV+

lundi 19 mai 2025

Coeurs noirs (saison 2) : Immersive et tendue, une série de guerre toujours très efficace

 

Coeurs noirs nous embarque en Irak, en 2016, aux côtés des forces spéciales françaises. Le final de la saison 1 nous avait laissé sur un gros cliffhanger, une saison 2 s’imposait donc ! [spoiler] L’ensemble des 6 épisodes de la saison sont centrés sur la libération de Sab, la snipeuse prise en otage par Daesh. Et si ça dure 6 épisodes, vous pensez bien que ça ne va pas se passer comme prévu… [/spoiler]

Dans le même esprit que la saison 1, Coeurs noirs continue à être une série de guerre très efficace. Il y a bien quelques facilités de scénario, quelques incohérences ou des “heureuses coïncidences” dans le récit mais dans l’ensemble ça tient la route. Et les derniers épisodes sont particulièrement tendus. Même si le récit évoque quelques thématiques comme la façon de faire face au stress et aux traumatismes sur un terrain de guerre, ou la difficulté d’avoir une vie de famille en parallèle d’un engagement dans les forces spéciales de l’armée, Coeurs Noirs est avant tout une série d’action, haletante et immersive. Et il faut avouer que sur ce plan, c’est tout à fait réussi. Avec, par ailleurs, un casting solide. 

Il faut quand même mentionner que quelques scènes sont assez dures et peuvent choquer, notamment des scènes assez longues de torture et d’autres avec des exécutions sommaires. Pour autant, ce sont des scènes tout à fait légitimes dans le récit. 

Bien qu’une saison 3 ne soit pas encore annoncée, la façon dont se termine le dernier épisode laisse la possibilité d’une suite… 

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Coeurs noirs (saison 2), une série créée par Corinne Garfin et Duong Dang-Thai
avec Nicolas Duvauchelle, Marie Dompnier, Nina Meurisse
Disponible sur Amazon Prime



dimanche 18 mai 2025

Parlement (saison 4) : Toujours satirique et très drôle... mais avec une pointe d’inquiétude

 

La quatrième et dernière saison de Parlement, l’excellente série satirique autour des institutions européennes, a été récemment mise en ligne. On y retrouve Samy (Xavier Lacaille, toujours parfait), le héros gaffeur et naïf, qui travaille désormais dans l’équipe de Valentine Cantel, la commissaire européenne très ambitieuse. Alors qu’il a l’idée “lumineuse” de proposer la création d’une police environnementale européenne qu’il choisit d’appeler “FBI”, Samy va se retrouver devant un défi bien plus grand : tout simplement sauver l’Europe ! 

La série est, dans cette saison 4, sans doute un peu moins pédagogique que les saisons précédentes (surtout les deux premières), même si cette dimension demeure tout de même, et qu’elle reste très informée sur le parlement et la commission européenne. Mais elle n’est pas moins fidèle à son ton humoristique, parfois absurde, toujours plein d’autodérision, et qui fonctionne toujours parfaitement. C’est finement écrit et toujours savoureux. 

Il y a toutefois dans cette dernière saison un ton un peu plus politique, on perçoit une certaine inquiétude poindre derrière la comédie, écho des menaces qui planent aujourd’hui sur le vieux continent. 

La série se termine même avec un brin de nostalgie, notamment avec la réapparition furtive de deux personnages qui avaient disparu de l’histoire : Eamon, l’éminence grise du parlement dans les trois premières saisons, et Michel, le parlementaire français lunaire pour lequel Samy travaillait au début de la série. 

L’épilogue renoue finalement avec un certain optimisme propre à la série, une volonté de croire encore en l’Europe, malgré tout. Et on a envie d’y croire avec Samy… 

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Parlement (saison 4), une série créée par Noé Debré
avec Xavier Lacaille, Liz Kingsman, Georgia Scalliet
Disponible sur France.tv

jeudi 15 mai 2025

Andor (saison 2) : La meilleure série dans l’univers Star Wars. Et de très loin.

 

La saison 2 d’Andor vient de se terminer sur Disney+. Et c’est toujours, et peut-être encore plus, la meilleure série en prise de vue réelle dans l’univers Star Wars. Et de très loin. 

Rappelons que la série suit le parcours de Cassian Andor, qui sera un des personnages centraux du film Rogue One, le “chaînon manquant” entre la trilogie et la prélogie et qui raconte comment les plans de l’Etoile de la mort ont été volés. 

Les douze épisodes de cette saison 2 sont regroupés en quatre fois trois épisodes, avec à chaque fois un saut d’une année dans le temps, qui nous rapproche petit à petit du récit de Rogue One. Tous les éléments se mettent en place au fil de la saison, en totale cohérence avec l’univers Star Wars. Et ceci pourtant, toujours sans aucun chevalier Jedi et presque pas de mention de la Force. Un petit peu quand même, vers la fin de la série, et une fois, dans le dernier épisode, avec la fameuse formule : “Que la Force soit avec toi”. La série se termine immédiatement avant le début de l’histoire racontée dans Rogue One (et ça donne d’ailleurs envie d’enchaîner en revoyant le film de Gareth Edwards…). 

Andor est une série sérieuse et même grave parfois. C’est une vraie série d’espionnage, haletante et épique, avec ses rebondissements. C’est une série de guerre, vécue du côté de la résistance. C’est aussi une série politique tout à fait actuelle, qui parle de lutte et de résistance à la tyrannie, de post-vérité et de liberté. 

Il n’y a aucune fausse note, jusqu’à un final ample et plein d’émotion, et un dernier plan empreint d’espoir. Une réussite totale. 

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Andor (saison 2), une série créée par Tony Gilroy
avec Diego Luna, Stellan Skarsgård, Genevieve O'Reilly
Disponible sur Disney+

vendredi 9 mai 2025

Le sens des choses : Une sérié très spirituelle, dans tous les sens du terme

 

Léa, 28 ans, est une jeune femme rabbine fraichement formée. Et ça ne plaît pas à tout le monde, à commencer par son propre père, psychanalyste, qui ne comprend pas du tout la démarche de sa fille. Embauchée dans une synagogue libérale de Strasbourg, elle va devoir faire ses premiers pas dans le métier, et tenter de répondre aux petites et aux grandes questions que le gens viennent lui poser, tout en faisant face à ses propres interrogations et ses doutes. 

Très librement inspiré de l’ouvrage Vivre avec nos morts, de Delphine Horvilleur, Le sens des choses est une série très spirituelle, dans tous les sens du terme : elle aborde de vraies questions existentielles, elle parle aussi de foi et de religion, mais elle le fait avec beaucoup d’esprit, de légèreté et de drôlerie. 

La série a indéniablement une vertu pédagogique pour mieux comprendre les rites et les coutumes du judaïsme. Mais elle a aussi une dimension universelle, évoquant les grandes questions existentielles, avec beaucoup de finesse et une sagesse toute hébraïque. Très loin de tout prosélytisme, la série préfère la nuance, l’interrogation voire le doute. Mais elle suscite la réflexion de façon intelligente. 

La série reste pourtant légère, souvent très drôle, parfois touchante. Elle est très bien écrite et interprétée, les dialogues sont tour à tour savoureux et profonds, les personnages, imparfaits, avec leurs failles, sont attachants. Elsa Guedj est épatante dans le rôle de Léa, entourée de personnages savoureux, incarnés par Eric Elmosnino, Manu Payet, Noémie Lvovsky ou Anouk Grinberg… excusez du peu !

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Le sens des choses, une série créée par Noé Debré et Benjamin Charbit
avec Elsa Guedj, Eric Elmosnino, Manu Payet
Disponible sur Max

lundi 5 mai 2025

Le combat des chefs : Le retour d’Astérix façon Chabat. Réjouissant, pour toute la famille.

 

Le dernier village d’irréductibles gaulois qui résiste encore et toujours à l’envahisseur est en danger. Leur druide Panoramix a pris un coup de menhir et il n’a plus toute sa tête : il ne se souvient plus de la recette de la potion magique… C’est le moment choisi par Jules César pour utiliser une coutume gauloise à son profit et enfin régner sur toute la Gaule : le combat des chefs ! 

Adaptation en série animée de l’album éponyme de Goscinny et Uderzo, Le combat des chefs est fidèle à l’esprit d’Astérix, tout en y ajoutant la fameuse touche Chabat et quelques clins d'œil modernes. L’animation 3D est assez joliment réussie. Le résultat est drôle, léger et vif, sans pour autant atteindre la réussite jouissive du film culte Mission Cléopâtre. Mais le divertissement est réjouissant, pour toute la famille : accessible aux plus jeunes, les aînés apprécieront les références qui jalonnent le récit. 

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Le combat des chefs, une série créée par Alain Chabat
avec Alain Chabat, Gilles Lellouche, Anaïs Demoustier
Disponible sur Netflix

vendredi 11 avril 2025

The Pitt : Immersion haletante dans un service d'urgences

Dans un hôpital de Pittsburgh, en Pennsylvanie, le service d’urgence fait face au flot incessant des malades et des blessés, légers ou graves, qui se pressent dans l’établissement. 

Immanquablement, dès les premières minutes du premier épisode, on pense à Urgences, la référence en matière de série médicale réaliste. On est clairement sur le même créneau, c’est immersif et prenant, et on ne comprend pas la moitié des mots que les médecins utilisent… mais ce n’est pas grave ! L’originalité de la série étant de proposer une intrigue en temps réel : chaque épisode correspond à une heure de garde dans le service des urgences.

Certes, on peut avoir une petite impression de déjà vu… mais c’est tellement bien fait, rythmé, haletant, avec un réalisme époustouflant qu’on reste scotché devant l’écran. Un épisode par semaine, c’est bien. Pas sûr qu’enchaîner tous les épisodes à la suite soit une bonne idée. 

On est confronté aussi, évidemment, à de grandes questions existentielles, face à des dilemmes éthiques. Certaines scènes sont très fortes, certaines histoires déchirantes. Dans un service d’urgences, on croise toute la misère du monde, on est confronté à toutes les questions humaines et sociétales. Le personnel doit aussi faire face aux impératifs économiques, le manque de personnels et de moyens, la surcharge des patients… On est dans un contexte américain mais les questions résonnent aussi dans notre contexte français. 

Et puis pour les nostalgiques de la série Urgences, dont je fais partie, il y a le plaisir de revoir Noah Wyle en médecin. On est loin du jeune interne un peu perdu et dépassé, il est dans The Pitt le Docteur Robinavitch (Robby pour les intimes), chef du service des urgences. Son charisme fait beaucoup pour la réussite de la série, tout comme la galerie de personnages croisés dans la série. Car c’est une série chorale, avec toute l’équipe médicale (on ne quitte jamais le service des urgences), des médecins expérimentés aux étudiants, infirmières, psychologues, travailleurs sociaux et personnel administratif. Certains attachants, d’autres agaçants. Au bout de quinze épisodes, on a nos petits préférés, et on les quitte avec le dernier épisode avec un petit pincement au coeur. Heureusement, une saison 2 est déjà annoncée !

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The Pitt, une série créée par R. Scott Gemmill et John Wells
avec Noah Wyle, Tracy Ifeachor, Katherine LaNasa

lundi 24 mars 2025

Severance (saison 2) : La dystopie grinçante est de retour... et toujours incontournable

 

On l’a attendue trois ans, cette saison 2 de Severance, l’une des séries les plus originales, les plus étranges et les plus fascinantes de ces dernières années ! Une longue attente enfin récompensée... 

Pour rappel, dans Severance, on a implanté une puce aux employés de Lumon Industries, qui a pour effet de dissocier complètement leur vie privée et leur vie professionnelle. Quand ils sortent de l’ascenseur qui les mène à l’étage de leur bureau, ils deviennent littéralement une autre personne, qui n’a aucun souvenir de sa vie personnelle en dehors, et c’est évidemment exactement la même chose lorsqu’ils ne sont plus au travail. 

On retrouve dans la saison 2 le même ton de satire grinçante du monde de l’entreprise, avec ses méthodes managériales infantilisantes, ses humiliations et pratiques déshumanisantes, son système d’ultra-surveillance, et ses tâches répétitives et absurdes… On en apprend toutefois plus sur Lumon, même si de nouvelles révélations viennent aussi accentuer le mystère. En revanche, on va enfin savoir à quoi sert le mystérieux travail de Mark et ses collègues, qui passent leur journée à transférer des chiffres dans des boîtes sur leur écran d’ordinateur. 

La saison nous en apprend aussi plus sur la vie extérieure à Lumon de Mark et ses collègues, et, sans trop en dévoiler, disons simplement que des interactions entre les deux identités de chaque personnage vont même s’instaurer, pour une réflexion troublante, et parfois assez vertigineuse, autour de thèmes existentiels comme l’identité ou le libre arbitre.

La série est toujours aussi étrange, réservant sans cesse des surprises et des rebondissements, créant parfois un certain malaise, dans une intrigue complexe qui brouille les pistes. Le soin particulier sur les décors et les costumes, la qualité supérieure de la réalisation et de l’interprétation, l’inventivité du récit… tout cela est à nouveau présent dans la saison 2 au terme de laquelle on aura levé une partie du mystère de Lumon, mais une partie seulement. Beaucoup de questions restent encore sans réponse, et de nouvelles questions ont émergé. Quant au dernier épisode (qui dure près de 90 minutes), il est assez dingue et se termine, évidemment, de manière ouverte pour nous faire trépigner en attendant la suite. Car la saison 3 est annoncée, et on ne devrait pas attendre trois ans cette fois pour la voir. Heureusement ! 

Severance demeure incontestablement une des séries actuelles à voir absolument !

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Severance (saison 2), une série créée par Dan Erickson
avec Adam Scott, Britt Lower, Tramell Tillman
Disponible sur Apple TV+

vendredi 14 mars 2025

Adolescence : Quatre fragments d’une tragédie familiale

 

Au petit matin, la police débarque chez les Miller et emmène manu militari Jamie, le fils âgé de 13 ans, affirmant qu’il est accusé de meurtre. En pleurs, Jamie crie qu’il n’a rien fait. Ses parents et sa grande sœur sont sous le choc, ils n’y comprennent rien. C’est forcément une erreur. 

Adolescence est une mini-série britannique magistrale. Quatre épisodes de 50-60 minutes et c’est tout. Quatre quatre plans séquences d’une maîtrise impressionnante et d’une intensité rare. Quatre fragments d’une tragédie familiale terrible. Chaque épisode vous prend et ne vous lâche pas… jusqu’au dernier plan qui vous laisse groggy. Et en même temps, vous avez tout de suite envie de connaître la suite. Le premier épisode autour de l’arrestation n’est pas loin du chef d'œuvre, le deuxième épisode est peut-être plus classique mais très efficace, le troisième épisode offre un face-à-face d’anthologie, et le dernier épisode déchirant nous laisse en larmes. 

La série aborde par ailleurs des thématiques contemporaines et fortes autour de l’adolescence : la violence, les réseaux sociaux, les influences toxiques, les dérives masculinistes… Il évoque aussi le désarroi, la souffrance et la culpabilité des parents par rapport à leurs enfants. Ça remue. Vraiment. 

Enfin, si la réalisation est brillante, soulignons aussi que l’interprétation de l’ensemble du casting est remarquable. A commencer par le jeune Owen Cooper, tout simplement incroyable dans le rôle de Jamie, ou le formidable Stephen Graham dans le rôle du père. 

Adolescence n’est rien moins qu’une grande mini-série. Déjà une des séries de l’année. Dont on ne sort pas indemne… 

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Adolescence, une mini-série créée par Jack Thorne et Stephen Graham
avec Stephen Graham, Owen Cooper, Erin Doherty
Disponible sur Netflix

mardi 25 février 2025

A Thousand Blows : Une plongée musclée dans les bas-fonds de Londres

Créée par Steven Knight, déjà à l’origine de l’incontournable série Peaky Blinders, A Thousand Blows propose une nouvelle fiction historique, inspirée (avec un certain nombre de libertés quand même) de personnages ayant réellement existé, à commencer par les Forty Elephants, ce gang criminel exclusivement féminin qui a sévi à Londres pendant plusieurs décennies aux XIXe et XXe siècles. 

On y croise, entre autres personnages historiques, Hezekiah Moscow, boxeur jamaïquain espérant trouver la gloire à Londres, Henry "Sugar" Goodson qui règne en maître sur le ring du West End, et Mary Carr, la reine des voleuses, qui se fait appeler Lady Augusta Farnley dans la bonne société. 

La série nous emmène ainsi dans une ville de contrastes, entre les quartiers populaires et mal famés de l’est de la ville et les quartiers chics de l’ouest, entre les rings clandestins de boxe à mains nues, qui pouvaient se terminer par la mort d’un des combattants, et le club londonien de West End, où les combattants s’affrontaient avec des gants, entre gentlemen. 

Le récit emprunte à différents genres : reconstitution historique, film de boxe, récit de braquage, chronique féministe, des histoires de rivalités, de vengeance, de racisme et de violence. Ca fait peut-être beaucoup d’intrigues différentes pour une mini-série de 6 épisodes mais il faut reconnaître que le savoir faire de Steven Knight fait encore mouche et qu’on se laisse embarquer avec un plaisir non dissimulé… grâce aussi à un solide casting, une réalisation impeccable et une reconstitution historique minutieuse (et une excellente bande originale du compositeur argentin Federico Jusid). 

Enfin, très bonne nouvelles, quelques images à la fin de l’épisode final laissent entrevoir la suite, pour une saison 2 déjà prévue !

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A Thousand Blows, une série créée par Steven Knight
avec Malachi Kirby, Erin Doherty, Stephen Graham
Disponible sur Disney+

lundi 17 février 2025

Bref 2 : Bref. C’est un retour réussi !

Le retour de Bref, c’est quand même une des plus grosses surprises de l’année dans le petit monde des séries. On n’imaginait pas une suite à ce programme court, diffusé à l’époque du Grand Journal sur Canal+ et devenu culte. Une référence dans le domaine, qui s’était arrêté il y a près de 15 ans (déjà !) après 82 épisodes… de moins de deux minutes. Revoilà donc Bref, cette fois sur Disney+ (avec toute la saison 1 à binge watcher en bonus). 

Le gros changement, c’est le format. Fini les pastilles survitaminées de moins de deux minutes. Bref 2 est une mini-série de 6 épisodes d’une durée de 30 à 40 minutes. Au total, ça fait finalement une durée totale assez proche… mais le récit est complètement différent. 

On y retrouve toujours le même personnage (dont on ne connaît toujours pas le nom), toujours en galère et incapable de trouver la moindre stabilité dans sa vie. On retrouve aussi les personnages récurrents de la série originale (les ex, la famille et les amis de “je”), incarnés par les mêmes acteurs et actrices. Mais il y a aussi plusieurs nouveaux personnages (notamment la coloc incarnée par Laura Felpin et le voisin incarné par Jean-Paul Rouve) et de nombreuses apparitions de guests prestigieux. 

Le ton de Bref est, heureusement, toujours bien présent dans Bref 2. Dans tous les épisodes il y a des séquences similaires aux pastilles de 2 minutes qu’on connaît, avec le même rythme, le même montage, la même voix off, le même humour corrosif, et le même sens aigu de l’observation. Mais la série s’enrichit d’autres types de récit, plus calmes, plus méditatifs, où l’introspection se fait plus profonde et les thèmes, parfois graves aussi, abordés de façon plus mature. L’humour est toujours très présent mais la série se pare aussi de mélancolie, de tendresse et d’émotion. Mine de rien, Bref 2 parle de l’importance de faire des choix et de les assumer, d’oser se remettre en question, d’être honnête avec soi-même et avec les autres… C’est, encore plus que dans le format original, une fable morale contemporaine. 

Bref, c’est un retour réussi, qui a su se renouveler tout en restant fidèle à son concept original ! 

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Bref 2, une mini-série créée par Kyan Khojandi et Bruno Muschio
avec Kyan Khojandi, Laura Felpin, Bérengère Krief
Disponible sur Disney+

lundi 10 février 2025

Asura : Un petit bijou de délicatesse et de finesse à ne pas manquer

 

Fin des années 1970 au Japon. Tsunako, Makiko, Takiko et Sakiko sont quatre soeurs aux personnalités bien différentes. L’aînée est professeure, la deuxième femme au foyer, la troisième bibliothécaire et la dernière serveuse. Takiko pense que leur père a une maîtresse et un enfant illégitime. Ses soeurs peinent à le croire… mais elles promettent de cacher cette information à leur mère. La révélation va pourtant mettre en lumière des secrets et révéler des tensions au sein de la famille, et chez chacune des quatre soeurs. 

Hirokazu Kore-eda est de retour sur Netflix pour une nouvelle mini-série. Après la merveille Makanai, Asura est un nouveau petit bijou de délicatesse et de finesse, dont toute la force est dans sa simplicité. 

La série suit, sur quelques années, la vie des quatre soeurs, leurs espoirs et leurs déboires, l’évolution de leurs liens familiaux et de leur sororité. Elle le fait avec beaucoup d’empathie, une pudeur toute japonaise, mais aussi de nombreuses petites pointes d’humour, et quelques moments bouleversants. C’est aussi l’occasion d’explorer la réalité d’une société patriarcale dans laquelle les femmes n’avaient guère d’autre horizon que de se marier et d’avoir des enfants… 

Or, le générique de la série l’exprime joliment, et avec une certaine malice : elle se tient aux côtés de ces quatres soeurs et de leurs combats (il faut d’ailleurs regarder sa version longue, complète, en post-générique à la fin du dernier épisode !)... sans pour autant rejeter en bloc les hommes, dont plusieurs bénéficient aussi d'un regard plein d'empathie. 

La série bénéficie aussi d'un casting formidable, à commencer par les quatre actrices qui incarnent ces quatre soeurs si différentes et auxquelles on s’attache profondément au cours du récit. Et les acteurs et actrices qui les entourent sont au diapason, au service de personnages bien caractérisés, si souvent touchants. 

Une mini-série à ne pas manquer... d'autant qu'elle peut facilement passer inaperçue dans l'abondante production de Netflix. 

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Asura, un mini-série créée par Hirokazu Kore-eda
avec Rie Miyazawa, Machiko Ono, Yû Aoi, Suzu Hirose
7 épisodes disponibles sur Netflix

vendredi 17 janvier 2025

Silo (saison 2) : Toujours une valeure sûre dans le domaine des séries SF

 

La saison 2 de Silo vient de se terminer sur Apple TV+ et la série confirme qu’elle est une valeure sûre dans le domaine des séries de SF en cours. 

[Spoiler] A la fin de la saison 1, on avait laissé Juliette seule, elle avait survécu à sa sortie et s’était réfugiée dans un autre silo dont apparemment tous les habitants avaient péri en sortant à l’extérieur. La saison 2 alterne son récit entre Juliette dans son silo, et la révolte qui gronde dans l’autre silo. [/Spoiler]

L’univers claustrophobique des romans de Hugh Howey est toujours aussi bien rendu, dans des décors très réussis. L’intrigue tient en haleine, même si le récit aurait peut-être gagné à être un peu resserré : un ou deux épisodes de moins auraient donné un peu plus de rythme à l’histoire. Les thèmes socio-politiques de cette dystopie post-apocalyptique sont toujours bien présents : autoritarisme, résistance ou soumission, lutte de classes, révisionnisme, désinformation… L’épisode final conclut de façon tout à fait satisfaisante la saison, avec un bon cliffhanger, comme il se doit, et un avant-goût de ce que sera la saison 3 (on rappelle que le deuxième roman de Hugh Howey fait un bond dans le passé pour expliquer l’origine des Silos…) et une dernière image maline. 

La bonne nouvelle est que les saisons 3 et 4 sont déjà commandées. L’histoire de Silo va donc pouvoir être menée jusqu’à son terme ! 

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Silo (saison 2), une série créée par Graham Yost
avec Rebecca Ferguson, Tim Robbins, Harriet Walter
Disponible sur Apple TV+