jeudi 28 avril 2022

Poupée russe (saison 2) : ludique et existentiel, un retour gagnant

 

Après une première saison très réussie, Poupée russe est de retour sur Netflix pour une nouvelle saison. Créée par Natasha Lyonne (qui joue aussi le rôle du personnage principal), la série est ludique et brillante, une fable fantastique aux accents philosophiques, qui s’amuse avec le temps. 

Dans la saison 1, Nadia se trouvait coincée dans une boucle temporelle le jour de son anniversaire, qui se terminait de façon tragique par sa mort accidentelle, avant de se réveiller et revivre la même soirée… Je n’en dirai pas plus pour ne pas divulgâcher mais ce n’est que le début d’un récit brillant avec de nombreux rebondissements. 

Dans la saison 2, qui se déroule quatre ans plus tard, on retrouve Nadia à quelques jours de son anniversaire qui, en prenant le métro, se retrouve soudain… en 1982. Mais elle n’est pas seulement propulsée 40 ans en arrière, elle l’est dans la peau de sa mère enceinte d’elle ! Et là aussi, ce n’est que le début d’un récit qui réserve son lot de surprises et de rebondissements. 

Avec cette nouvelle saison, la série parvient à se renouveler tout en utilisant les ingrédients qui ont fait la réussite de la première saison. On retrouve la même qualité du scénario, très malin, avec de nombreux rebondissements étonnants (il y aura bien plus que des allers-retours entre 2022 et 1982 !), un récit qui se complexifie et finit par partir en vrille de manière réjouissante, avant de se terminer de façon émouvante. Les dialogues dont très bien écrits et drôles. Et puis il y a des personnages hauts en couleurs (la gouaille de Nadia !), qui prennent de l’épaisseur en découvrant leur passé familial. Comme en saison 1, l’histoire démarre sur un ton plutôt léger pour prendre de l’ampleur au fur et à mesure du récit, jusqu’à évoquer des questions existentielles et profondes, autour de l’héritage familial et la façon dont il nous détermine ou pas, la construction de notre identité, l’impact et les conséquences de nos choix… Et tout cela en 7 épisodes d’une petite demi-heure seulement ! 

Une série à ne pas manquer ! Et même à rattraper si vous n’avez pas vu la saison 1 ! 

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Poupée russe, une série créée par Natasha Lyonne et Amy Poehler

2 Saisons (15 épisodes de 30 minutes environ) disponibles sur Netflix



samedi 16 avril 2022

En thérapie : la magie opère à nouveau !

 

En thérapie revient pour une saison 2, et c’est peu dire que je l’attendais avec impatience !

Le dispositif reste le même : chaque épisode de 25 minutes environ est une séance de psychothérapie, du lundi au jeudi, avec les mêmes patients, et le vendredi, c’est le psychanalyste lui-même qui rencontre son superviseur. Et la magie opère à nouveau ! Toujours la même économie de moyens, toujours la même subtilité et la même profondeur, et puis ce ton si particulier, qui fait de cette série une sorte de thriller intime entièrement basé sur le dialogue qui, d’une certaine façon, donne à voir l’inconscient, où des hommes et des femmes, petit à petit, se dévoilent et se livrent. 

Bien-sûr, les intrigues s’autorisent quelques raccourcis, les séances vont un petit peu vite par rapport à la réalité, le psy est parfois un peu trop directif… Mais il s’agit d’une série, pas d’un reportage sur la psychanalyse. Une série qui illustre à merveille la valeur inestimable de l’écoute et de la parole. 

Au niveau des intrigues, la série parvient à se renouveler, abordant d’autres thématiques mais tissant aussi quelques liens avec la saison 1. Ainsi, un des jeunes patients de la saison 2 est le fils d’un couple croisé en saison 1, et le psychanalyste est dans cette saison en procès à la suite d’un autre patient rencontré en saison 1. Je n’en dirai pas plus, si vous ne connaissez pas la série, pour ne pas spoiler… En tout cas, nous sommes quatre ans après la saison 1, au lendemain du premier confinement dû au Covid 19. Comme dans la première saison, le contexte est évidemment important et entre en écho ou agit comme révélateur des problèmes rencontrés par les différents patients. 

En face du même psy, le Docteur Dayan, toujours incarné à la perfection par Philippe Pierrot, on rencontre quatre nouveaux patients : Ines (Eye Haïdara), une jeune avocate qui avait été suivie, adolescente, par le Docteur Dayan ; Robin (Aliocha Delmotte), un pré-adolescent en surpoids victime de harcèlement scolaire ; Lydia (Suzanne Lindon), une étudiante à qui on vient de diagnostiquer un cancer ; Alain (Jacques Weber), un chef d’entreprise dans la tourmente après le suicide d’une de ses employées. Et puis enfin Claire, une psychanalyste qui a écrit un livre, succès de librairie, que Dayan sollicite comme superviseuse en lien avec son procès. Pour mettre en scène ces cinq histoires, Olivier Nakache et Eric Toledano ont fait appel à d’autres grandes réalisatrices et grands réalisateurs que pour la première saison : Agnès Jaoui, Arnaud Desplechin, Emmanuelle Bercot et Emmanuel Finkiel. 

Les cinq intrigues sont passionnantes, remarquablement interprétées par des acteurs formidables et mis en scène avec une grande finesse. Mais celle qui m’a peut-être le plus touché est celle avec Alain, le chef d’entreprise. Nul doute que Jacques Weber, extraordinaire, et Emmanuelle Bercot derrière la caméra, y sont pour quelque chose ! 

Tous les arcs narratifs se terminent de manière émouvante, avec des fins plus ou moins ouvertes, où on se plaît à imaginer comment les différents personnages évolueront par la suite : le travail ne fait que commencer pour eux !  

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En thérapie, une série créée par Olivier Nakache et Eric Toledano

35 épisodes de 25 minutes environ, diffusion en cours sur Arte mais tous les épisodes sont disponibles sur www.arte.tv  



vendredi 8 avril 2022

Severance : une dystopie grinçante et brillante dans le monde du travail


Mark travaille pour Lumon Industries. Comme tous les employés de l’entreprise, il a subi une opération chirurgicale : on lui a implanté une puce qui permet de dissocier complètement sa vie privée et sa vie professionnelle. Il devient littéralement deux personnes différentes : lorsqu’il est à son travail, il n’a aucun souvenir de sa vie personnelle en dehors, et inversement lorsqu’il n’est plus au travail. 

Severance est une série dystopique brillante, créée par Dan Erickson, produite et réalisée par Ben Stiller (et Aoife McArdle), une critique grinçante du monde du travail. Car chez Lumon Industries, les conditions de travail sont déplorables. Les bureaux sont au sous-sol, sans aucune fenêtre. On y accède par d’interminables couloirs qui rappellent un labyrinthe. La surveillance des employés est totale, avec des caméras partout, des récompenses ridicules quand l’objectif de rentabilité est atteint et des châtiments humiliants en cas d’insubordination. 

Par ailleurs, l’organisation hyper-compartimentée rend le travail absurde. Mark travaille au bureau de raffinement des macrodonnées. Avec son équipe, ils passent leur journée devant leur écran d’ordinateur à mettre des chiffres dans des boîtes. Mais ils n’ont aucune idée pourquoi ils le font, ni ce que Lumon Industries produit. Ils n’ont aucun contact avec les autres services. 

Au début de la série, on est intrigué et amusé. Il y a quelque chose de surréaliste et loufoque dans cette caricature du monde du travail. Et puis, petit à petit, un certain malaise s’installe, à mesure qu’on apprend à connaître les personnages (notamment dans leur versant privé), qu’on découvre les mystères de l'entreprise, ses dirigeants (du moins ceux que l’on peut voir), leurs méthodes et leurs intentions. La tension monte et devient vraiment palpable dans les derniers épisodes, jusqu’à un final véritablement haletant, riche en révélations et surprises. Et, évidemment, la dernière image est extrêmement frustrante... car il y aura une saison 2, qui s’annonce passionnante : tant de questions restent en suspens ! 

Le scénario est malin, la réalisation parfaite, les acteurs excellents. Aux côtés d’Adam Scott, remarquable, on retrouve des pointures comme John Turturro, Patricia Arquette ou Christopher Walken, et d'autres acteurs moins connus mais très bons. Parmi les références cinématographiques auxquelles on pense en regardant Severance, il y a Brazil, Eternal Sunshine of the Spotless Mind ou The Truman Show. On peut penser aussi à certains épisodes de Black Mirror. Excusez du peu ! 

Severance est une série qui s’impose donc comme l’un des fleurons (avec For All Mankind) du catalogue de la plateforme Apple TV+, et tout simplement une des séries en cours les plus excitantes. Vivement la saison 2 ! 

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Severance, une série créée par Dan Erickson
9 épisode de 45 minutes environ, disponibles sur Apple TV+