Il fallait être gonflé pour tenter l'adaptation au cinéma du livre de Boris Vian. Michel Gondry a osé et il réalise un film étonnant et surréaliste. Et par ce fait, bien dans l'esprit de Boris Vian.
Tout commence dans une fantaisie légère et pétillante pour se terminer dans le désespoir le plus noir. Le scénario s'accompagne d'un travail étonnant sur l'image. Au début, les couleurs sont éclatantes et, imperceptiblement, elles se ternissent petit à petit jusqu'à une image en noir et blanc, et même simplement grise, gagnée par le noir à la fin du film. Les effets spéciaux "à l'ancienne" sont volontairement kitsch. Réalistes, ils n'auraient pas été à leur place. On est ici dans la poésie, même si elle est parfois cruelle et morbide.
Il y a bien quelques longueurs mais aussi de belles trouvailles. Et même quelques scènes mémorables : l’hystérie collective à la conférence de Jean-Sol Partre, façon rock-star, déclamant un discours incompréhensible dans une pipe géante !
Histoire d'amour dramatique, le film montre comment toute une vie peut basculer lorsqu'un petit grain de sable (ici, un nénuphar dans le poumon de Chloé) vient s'insérer dans les rouages et enclencher une machine infernale. Le film devient oppressant, avec la maison de Colin qui s'assombrit, envahie par des toiles d'araignée, se rétrécit et même change d'environnement pour se retrouver au bord du périphérique avec les voitures, le bruit et la pollution.
Une citation du livre de Boris Vian est mise en évidence dans le film : "Les gens ne changent pas, ce sont les choses qui changent." Mais les choses peuvent étouffer les gens, et les tuer. Surtout dans une société déshumanisée où les hommes ne sont que des machines jetables...
Pas très optimiste tout ça ! C'est vrai... Pour garder le sourire, on se souviendra de la première moitié du film et son univers surréaliste délirant. La fin du film nous fera réfléchir à la fragilité de notre vie, la fragilité du bonheur.
Surréaliste et étonnant : un pari réussi pour Michel Gondry !
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